Petit sortilege sans pretention

Petit sortilege sans pretention

Le roi Tyran (dés 5 ans)

 

 

 

Il était une fois dans un pays pas si loin, un roi très autoritaire.

Il se trouve que ce roi, petit garçon, était pour son père et sa mère, le seul trésor de cette terre. Tous ses caprices étaient des ordres, fussent-ils extravagants ou irréalisables.

Le petit prince réclamait un cygne, on lui donnait un cygne, exigeait un éléphant, une expédition partait en Afrique, quérir un éléphant.

Un jour même, il ordonna -car c’est ainsi qu’il s’adressait à ses parents, il ordonnait- , il ordonna qu’on lui chercha la lune. Bien sûr c’est impossible et pourtant cela coûta quelques années de cachot aux cinq soldats et scientifiques à qui on avait donné cette mission.

Le petit prince grandit, ses parents très âgés moururent et c’est à lui que revint la couronne.

 

En grandissant, le prince Hannibal devient le roi Tyran. Ce faisant, il apprit tout de même que certaines choses sont impossibles.

Néanmoins, il était resté un homme capricieux, à l’humeur inégale, exigeant parfois de ces sujets, des choses tout à fait ridicules.

Il régissait son royaume à coup de lois et de règles si nombreuses, que lui-même en avait oublié la moitié.

Ainsi, dans ce pays pas si lointain, on portait des chaussettes rouges le lundi, à pois bleus le mardi, mercredi n’en mettait point, jeudi qu’elles vous aillent au teint, vendredi elles seront blanches… Oh non ! Ça c’était pour le dimanche. Donc vendredi on choisissait, mais il ne fallait pas qu’elles fussent jaunes, samedi, les chaussettes avaient des doigts. Dimanche, comme on l’a dit, déjà les chaussettes étaient blanches.

Dans chaque soulier, dans chaque sabot, chacun obéissait car le roi avait, pour vérifier la bonne exécution de ses ordres, une foule de soldats de capitaines, et un général. La méchante humeur du roi gâtait celle de son général qui à son tour criait sur ses commandants et capitaines, lesquels se vengeaient en hurlant sur les petits soldats.

Et puis leur rations de nourriture étaient maigres et ils avaient de fréquentes punitions. Toute l’armée du Tyran était donc fort mal traitée et mal nourrie mais ils étaient soldats et n’auraient pas trouvé un autre travail.

Et donc, quoique mécontents, ils exécutaient les ordres du roi, contrôlant partout et toutes choses, jusque dans les souliers de la population.

 

 

Je ne peux vous faire la liste de tout ce que les sujets du royaume devaient mettre en œuvre pour n’être pas condamné à la prison. Car il n’était pas question que de chaussettes, mais aussi de longueur de cheveux, de taille de pieds (on dût en couper quelques-uns), de vêtements à porter si le roi avait chaud, ou s’il avait froid, de la couleur des maisons, du nombre d’enfants par famille…

Tout ce que le roi avait imaginé, émanait de sa seule personne et nul autre que lui ne pouvait mener sa vie comme il l’entendait. Tous les jours un Hérault sonnait sa trompe et lisait les nouvelles lois puis il décrivait la tenue du souverain pour que chacun fasse de même.

 

Hannibal le Tyran oubliait souvent les règles qu’il inventait, par exemple, un lundi où il faisait chaud, le Roi ne porta pas de chaussettes : aussi les habitants de la ville ne savait pas si c’était un jour de chaussettes rouges ou si, pour faire comme le roi, c’était un jour sans chaussettes.

La moitié de la population fut condamnée à la prison pour avoir porté des chaussettes et l’autre moitié pour n’en avoir pas porté !

Mais il était impossible de mettre tous ces gens en prison, aussi le roi décida-t-il que, pour cette fois, une amende suffirait.

 

Les choses étant ce qu’elles étaient, la vie dans ce royaume pas si lointain, devenait très compliquée.

Chacun souffrait en silence, sauf lors des réunions du soir, où tout doucement dans la pénombre, l’on disait du roi qu’il était fou, et sans doute l’était-il.

Mais qui pouvait s’élever contre Hannibal ? Il y avait tant de soldats ! Des soldats affamés toujours prêts à se mettre en colère contre n’importe qui.

 

Personnes n’osait désobéir, pourtant les cachots du château étaient pleins.

Alors les habitants s’arrangeait avec le peu qu’ils avaient et n’osait même pas penser à chasser Hannibal le roi Tyran.

Croyez-vous que le roi était heureux ?

Eh bien non ! Il ne l’était pas, de lois en lois, et ne manquant pourtant de rien, le Roi avait un vide dans le cœur qu’il ne parvenait pas à remplir.

 

Un jour, d’un autre royaume, une jeune femme entra sur les terres d’Hannibal et pénétra dans la ville, où se trouvait le château.

Elle ne passait pas inaperçu, c’était une jeune femme rose, joyeuse, souriante, libre.

Elle distribuait ses sourires et sa tendresse à chacun. Bien vite, elle fût connue de tous, généreuse Rosabelle...

Le roi alors, entendit parler d’elle. Il exigea qu’on la conduise au château.

Un soldat, Jean le Bon se rendit en ville avec quelques hommes et il aborda la jeune femme. Qu’elle était rose, qu’elle avait l’air fraîche, comme elle semblait joyeuse, comme il avait envie qu’elle l’aimât ; oui ! Comme il avait envie qu’elle l’aimât… Alors, il parla avec elle, lui offrit quelques bonbons et des fleurs… Jean le Bon était amoureux mais il fit ce que le roi exigeait et conduisit Rosabelle au château.

 

Que croyez-vous qu’il se passa quand le roi la vit ? Il décida que cette femme était pour lui et exigea qu’elle l’épousa.

Tout roi et Tyran qu’il fut, Rosabelle ne s’en laissât pas compter et, tout net, refusa de l’épouser.

Personne n’avait jamais dit non au roi : il entra dans une colère terrible et s’il n’avait été fou déjà, assurément, il le devint. Les joues gonflées de rage et le visage violacé, sa voix puissante traversa les murs du château, et l’on entendit le souverain fulminer : 

« Qu’au cachot on emmène Rosabelle et que jamais elle ne revoit la lumière du soleil ».

 

Ce jour là furent édictés cent lois, commandements et décrets, rendant la vie de tous encore plus difficile.

Jean le Bon gardait la porte de la salle du trône. Il n’osait ni respirer ni souffler. Il se faisait le plus discret possible. Étant donnée l’humeur de son seigneur, il valait mieux se rendre invisible.

Ce soldat-ci n’était pas comme les autres, il aurait pu faire bien d’autres choses. Son véritable talent était celui d’un potier, qu’il avait hérité de son père.

 

Les lois absurdes du pays avaient jeté son père et sa mère dans les cachots car, se croyant dimanche, un samedi, ils avaient tous les deux mis des chaussettes blanches. Un soldat contrôleur vérifiant, la couleur d’icelles, constata que ces chaussettes n’avaient pas de doigts. Il fit jeter aux cachots le pauvre couple.

Le soldat aurait pu choisir d’être plus gentil et les laisser passer, mais il n’avait pas assez mangé et ça le rendait méchant.

Le fils du potier, Jean Le Bon, afin de les voir et de les protéger au mieux s’engagea dans l’armée de soldats du roi.

 

Le jour où Rosabelle avait osé dire « Non ! » au, roi, ce jour où Jean le Bon gardait la salle du trône, aussi discret qu’il se fût fait, le roi qui ne savait plus où passer ses nerfs le remarqua. Sa folie se fixa soudain sur le soldat.

Hannibal le regarda des pieds à la tête et le trouva bien gras et le lui dit :

« Vous autres soldats vous êtes trop gras vous coûtez trop cher à nourrir ; désormais vous ne mangerez plus qu’un jour sur deux ! Cherche mon clerc, je veux une loi ! Les soldats ne mangeront plus qu’un jour sur deux ! »

 

Il ordonna à Jean de trouver le législateur (c’est un homme qui écrit les lois).

Jean le Bon fronça les sourcils, tout à coup il se trouva très en colère, il pensa à ses parents et à Rosabelle que tous aimaient et que pourtant qu'on avait mis au cachot, il pensa à ses amis soldats malheureux et mal nourris ! Il pensa à toutes ces lois idiotes ! Et alors il gronda :

« Non ! Cherchez-le vous-même ! »

 

Le roi faillit s’étouffer de colère et hurla à la Garde de venir arrêter Jean. La Garde entra dans la salle du trône. Jean le Bon leva le menton et leur dit :

« Il a une nouvelle loi, désormais nous ne mangerons plus qu’un jour sur deux ! »

 

Tous les soldats présents se tournèrent vers le roi qui s’égosillait :

« Arrêtez-le ! Arrêtez-le »

 

Aucun d’entre-eux ne bougea.

Le Roi Tyran hurlait :

« Général ! Général ! Appelle la garnison, faites pendre les traîtres. »

 

Le général qui faisait sa toilette tout à côté. Se précipita dans la salle du trône en chemise de nuit et fut tout étonné de voir le roi face à dix ou douze soldats croisant les bras et visiblement mécontents.

« Et alors qu’est-ce qu’il se passe ici ? Gronda le Général »

 

Le soldat potier Jean répondit :

« Le roi ordonne que les soldats ne soient plus nourris qu’un jour sur deux ! Il veut que le législateur vienne écrire cette loi ! Le Tyran vociférait,

- Je suis le roi ! Général fais venir la garnison ! 

 

Le Général, furieux à son tour dit à Jean :

« Allons Jean obéit au roi va chercher la garnison et dit leur la nouvelle ! »

 

Après la garnison, rapidement, tous les soldats de la ville furent ainsi prévenu qu’Hannibal le Tyran voulait les priver de nourriture.

Comme un seul homme ils rejoignirent la salle du trône et derrière eux l’ensemble de la population les suivait. Et leur colère à tous était si grande qu’ils voulaient attraper ce roi qui avait fait du mal à tant de gens et le tuer.

 

Enfin, on osait s’opposer au Roi Hannibal et Rosabelle n’y était pas pour rien.

Car voyez-vous, Jean le Bon avait aimé la joie de vivre de la jeune femme et l’amour qu’elle donnait à chacun.

Il voulait trouver une femme pour partager de sa vie et il croyait qu’en Rosabelle, si elle voulait bien de lui, il pouvait l’avoir trouvée.

C’est elle qui lui avait donné la force de dire non au roi et c’est par lui que tous les autres avaient trouvé le courage d’en faire autant.

 

Lorsque la salle du trône fut remplie au point qu’aucun poisson n’aurait pu s’y glisser, Le souverain Hannibal comprit qu’il était allé trop loin.

Il tenta de s’échapper : c’était impossible. Yvan le géant, un soldat immense, lui saisit le col et s’apprêtait à le jeter par la fenêtre mais Jean s’interposa lui parla ainsi qu’à la foule enragée :

« Hannibal le Tyran ne peut plus faire de mal à personne, mais si nous le tuons, nous serons comme lui : de méchants hommes, des hommes sans pitié ! Faire du mal n’apporte jamais rien de bon. Et ce roi est fou, ce qu’il faut c’est qu’il soit soigné, peut-être pourra-t-il se conduire autrement. »

 

Ainsi donc dans ses cachots, le roi fut conduit mais bien traité je vous l’assure.

Un médecin s’occupa de lui.

 

Tout le monde fût libéré des cellules de la prison du château.

Bien sûr, ce fut Jean le Bon qui délivra ses parents et Rosabelle.

Elle comprit rapidement qui était Jean, sa mère, son père..

Il ne lui fût pas difficile de les aimer et d’épouser cet homme qui l’avait délivrée.

 

Le pays était bouleversé sans toutes les lois pour le désorganiser et sans roi pour le gouverner personne ne savait plus s’il fallait aller à l’école, travailler dans les champs, mettre des chaussettes ou un chapeau sur la tête, quand travailler, quand se reposer… Et naturellement, on se tourna vers Jean le Bon, à l’origine de la révolution.

On le supplia d’accepter de diriger le royaume à la place d’Hannibal.

Jean le Bon accepta mais demanda l’aide de tous.

Il retourna dans sa maison avec sa Rosabelle et ses parents et ne commanda aucune loi.

Les habitants décidaient ensemble de ce qui était bon pour tous, et chaque habitant devint un roi. La raison et l’intelligence gouvernèrent le royaume.

La première loi que tout le monde accepta fut de transformer le château en hôpital.

La deuxième loi, que chacun pourrait porter les chaussettes qu’il voulait à ses pieds ou pas de chaussettes s’il n’en voulait pas

 

Pour finir, est-ce que le roi fut sauvé de sa folie, je ne saurais le dire, mais je crois savoir, que le temps passant, il fut moins malheureux et remplit son vide d’histoire lues et contées.

 

 



04/01/2021
4 Poster un commentaire

A découvrir aussi


Inscrivez-vous au blog

Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour

Rejoignez les 57 autres membres