Atengouffre ( pas pour les petits, ça fait peur ! )
sortoudérons lé vagon
lé ribelle, lé vitasse
Craindrons tipon dey mangeon
Qui crevelle dans lé nasse
Foudramornille et puitou
centibrule au foutoir
chiréchaire boursafloison
candélabre au cavadre
lividésang à mouroir ondisouffre
a bourrir vent crémitoire atengouffre.
atengouffre atengouffre attengouffre.
C'est dans l'ombre qu'on les trouve, elles chuchotent et ricanent.
Elles soufflent.
Elles cherchent.
Elles accomplissent son grand dessein.
Une nuit hostile j'ouvre les yeux : elle flotte allongée, à quelques centimètres de mon corps étendu sur le dos. Elle porte sa lumière en elle, une pulsation maladive qui fait luire ses chairs. Ses yeux noirs sans prunelle, ses yeux noirs malveillants sont rivés aux miens… Je suis incapable de remuer d'un millimètre, respirer est déjà un exploit. Un hurlement prisonnier de mon larynx m'étouffe.
Elle chuchote, sa bouche répugnante contre la mienne :
« Sennifaire mon étouche, c'est pas loin qui frousse. Chhh » et ses dents se plantent dans la muqueuse de mes lèvres.
Elle disparaît.
Je suis tellement choqué que mon visage reste totalement contracté. Pendant longtemps je ne peux pas bouger. Les pupilles dilatées... Cette affreuse douleur au larynx. Le sang coule dans mon cou.
Enfin le temps repart à nouveau et avec lui un braillement s'extrait de mon ventre, de mon plexus, de ma gorge et puis s'éteint.
Je me lève brutalement terrifié de ne pas tout voir, tout autour de moi… Terrifié de l'avoir vue.
Mon visage, ma bouche me font mal, je ne peux pas rester là ! Je m'enfuis comme un animal qui craint le feu.
Dans la rue, au milieu des gens indifférents, je m'arrête. Les bras ballants, le long du corps, je ne sais pas quoi faire.
C'est un flic qui me ramasse là :
« -Hé ben ! Mon p'tit vieux, c't'une vilaine coupure sur votre visage. J'vous conduis à l'hôpital. »
Je chiale comme un gosse, d'effroi et de soulagement.
C'est en effet une vilaine plaie. Le médecin urgentiste fait ce qu'il peut. Il me demande ce qui m'a blessé mais je ne peux pas parler. Il met ça sur le compte de la douleur, et me fait conduire dans une chambre pour la nuit.
Drogué pour supporter le mal de ma bouche, je ferme les yeux résolu à oublier ce précipice dans ma vie et m'endors.
Un murmure contre mon oreille :
…. « Créville dé fouche oliférant! Souvri, souvri... »
Le cœur à bout de souffle et la gerbe dans la gorge, me le disent: « C'est pas fini ! »
Toute ma volonté se raidit pour tenir mes yeux fermés. Je sens son souffle et la férocité de ses propos que je ne comprends pas. Elle plaque ses deux mains sur mon visage déchirant les blessures sous le pansement.
Ses doigts spongieux forcent mes yeux à s'ouvrir. Cette fois je parviens à hurler, hurler à m'en péter les cordes vocales. Cette salope hurle aussi et rit et hurle encore. Elle est nue et sa peau en carton est corrompue, elle sent aussi mauvais que le Diable. Et ce trou dans sa face qui aurait dû être une bouche ; mais les incohérences de ses dents -au moins trois rangées- et cet organe bizarre contre son palais…
Haaa… Mon corps s'élève avec cette chose à califourchon sur moi. Et tandis qu'elle m'agrippe par les épaules, elle me retourne et s'enroule autour de moi. Je suis rigide, comme la première fois, incapable de bouger. Le manège m'a fait taire. Je pleure, et l'eau ruisselle le long de mon nez pour tomber sur le lit :
« Effinoche lapriva, antacrite a la souillu.»
Comme si elle était d'accord la chemise de l'hôpital se déchire en deux et les ongles de la créature se plantent dans mon dos et tracent des arabesques de feu :
« Policéran fouche oliférant, cernabile dans lé crétasse chhchhh »
Tous mes muscles se relâchent brusquement et je tombe dans mon lit. Je me remets à hurler et prends conscience du raffut contre la porte de la chambre. Une infirmière hystérique me crie de lui ouvrir. J'entends des pas dans le couloir, des gens ne vont pas tarder à entrer.
Pris par le traumatisme et le désespoir, je ne veux pas rester ici pour expliquer quoi que ce soit. Qui me croirais ?
« Derlanfiche sai pour ton ».
Je sors par la fenêtre, en bas de pyjama. Le sol n'est pas très haut, je saute. Je me désintéresse du monde et je rentre chez moi.
La lumière me blesse les yeux, ma bouche est collée au pansement et mon dos est collé au lit. Je ne me rappelle pas comment je suis rentré.
Et je ne veux pas me lever. J'ai de la fièvre. Je suis trop faible pour raisonner ou anticiper quoique ce soit…
Mais quand la nuit tombe, je me fais dessus, c'est pas possible de ne pas mourir en ayant peur comme ça. Je m'arrache de mon lit, les croûtes qui couvrent mon dos restent dans les draps. Ma peau est balayée de frisson, la sueur dégouline de chaque poil de mon corps. Sur mes jambes qui me portent à peine, je chancelle jusqu'à la porte, je n'ai pas de plan, mais je ne veux pas être seul. Je réalise que je dois tenter de m'habiller un peu et d'arranger la bouillie de ma figure. La tâche n'est pas simple et mobilise beaucoup de temps… Je reste attentif aux bruits, je regarde au dessus de mon épaule à toutes les secondes qui passent.
HA !La douleur de ma bouche quand j'enlève le pansement !
Mais, bordel pourquoi mon univers s'écroule-t-il ? ! Qu'est-ce qui se passe ? Je sursaute, ça chuchote pas loin, les ombres s'épaississent.
Je me barre, je me barre ! Viiite !
Dehors le monde m'agresse qui grouille, de bruits, de routines stupides, de visages autosatisfaits. Je réalise que personne ne peut me porter secours, ils sont tous dans leur monde, étranger à la vérité, étranger les uns aux autres ; indifférents à ce qui n'est pas eux, épinéfra pour toujours.
Chhh chhhhhhhhhhh
… qui marche à côté de moi. La peur à nouveau me fige et me muselle. Les nausées me reprennent et la sueur me détrempe. Rhhââ, c'est odieux ! Elle se frotte contre moi, sa peau… Et elle me mort ! Même pour la repousser je ne peux pas la toucher ! Je me mets en boule et m'adosse au mur et je subis l'intrusion de ses mains spongieuses, de ses dents, de sa peau de carton abrasive et nauséabonde au possible.
« Créyou siproche épernille dufaret souvri »
Elle agrippe mes cheveux et passe sa langü tule ofrisèche. Pouah ! Senvitréche démon !
Ses yeux malveillants brillent de joie. Elle lâche mes poils.
Chhhchhhh et s'évapore.
En moi une digue se rompt. Je perds pied. Dans un coin de ma tête, il y a un endroit de silence absolu, où les messages de mes nerfs n'arrivent plus. Un endroit où je peux me reposer...
Si tu entends, tu es prêt !
Cette voix...
Nous ferons de grandes choses ! Des choses délicieuses !
Elle grince comme une craie sur le tableau...
Sentifroche comme dornack tu débris ?
J'ouvre mes yeux brusquement.
Même mes cauchemars n'ont plus de sens, je remonte peu à peu à travers le chaos de ma catatonie.
Personne n'a rien remarqué, on dirait ! C'est dingue ! En plein milieu d'une rue, une atrocité démoniaque et lumineuse se déhanche, baragouine des trucs improbables et les gens se baladent… M'enjambent même !
Quelle affreuse engeance que ces diables d'hommes, de femmes et de morveux !
Putain ! Qu'est-ce qu'il a ce chat à me cracher dessus comme ça ! Saloperie !
Je respire un grand coup, la peur reflue vers une fatigue incommensurable.
J'ai de la fièvre, c'est évident. Ça ne sert à rien que je reste ici, apparemment cette chose m'écharpe où elle veut.
J'appuie sur mes bras et mes jambes pour me lever.
J'ai mal ! Je pue ! Je sens la pourriture, je vais me traîner chez moi et prendre une douche si je peux.
Chez moi, la porte est ouverte, telle que je l'ai laissée ; mais la lueur jaunâtre qui teinte le seuil de l'appart ne m'incline pas à entrer.
Ça chante. Cette chose chante : c'est sa voix.
...lividésang à mouroir ondisouffre
à bourrir vent crémitoire atengouffre.
Atengouffre atengouffre attengouffre.
Le minuteur de la lumière du couloir se déclenche et la lumière s'éteint, ma respiration s'arrête… Et immédiatement sa face monstrueuse est à dix centimètres de mon visage, elle se déplace si vite qu'on dirait qu'elle apparaît là où elle va. Je ferme les yeux, mes jambes se dérobent…
Le soleil brûle ma peau, je suis vautré dans le couloir. Je me réveille d'un sommeil d’évanoui qui m'a fait du bien. La porte de mon appartement est toujours ouverte ; pas de lueur répugnante, que le soleil qui m'empêche d'ouvrir les yeux.
Je vais jusque la salle de bain et sans allumer la lumière, j'enlève mon pull, mon froc, et je me place sous un jet d'eau chaude.
Les poils de ma nuque se hérissent, je sens qu'elle est là déjà, encore. Sa présence est si forte que je la devine dressée contre la porte, le cou tendu, le menton pointant le sol. Ho, je la vois dans le miroir, son sourire maléfique posé sur sa mine. Je m'effondre dans la baignoire.
Je tremble, je ne suis pas assez solide pour supporter qu'elle vienne me renifler ou me mâchouiller. Dans mon esprit, je tatonne pour retrouvez ma bulle de silence et disparaître du monde réel, je m'y glisse en fermant les yeux.
Mais je ne suis pas seul… Une présence est là dense, infinie qui dévore tout, l'espace et le temps, mon esprit et ma raison .
Founarpir de conto, plus jamais seul...
Elle a comtaprité de vienson toi pour toujours.
Et vitapermis me servir éparpillon dentrie.
Je n'ai plus rien à sauver, nulle par où aller, où me cacher.
Je n'ai plus de passé, je n'ai pas d'avenir, je n'ai plus que moi dans ma peau de carton.
Alors j'ouvre les yeux, elle flotte devant moi. L'affreux organe de sa bouche se déploie. Un dard plonge dans mon front et fouraille ma cervelle tandis que je m'entends hurler dans l'autre monde.
Et la goule chante sa ritournelle des noces.
Maintenant que je suis prêt et que, comme elle, je vais le servir pour enfanter les cauchemars des hommes ; alors je comprends ce qu'elle dit :
sortoudérons les vagons
les ribelles, les vitasses.
Craindrons tipon des mangeons
Qui crevelle dans les nasses
Foudramornille et puitou
centibrule au foutoir
chiréchaire boursafloison
candélabre au cavadre
lividésang à mouroir ondisouffre
a bourrir vent crémitoire atengouffre
Atengouffre atengouffre attengouffre.
je suis née de l'ombre
d'un fléau et d'un cadavre
et c'est dans ce monde que je cherche un autre
tu n'es pas encore goule mais j'arrangerai ça
pour repeupler l'enfer ici bas
j'ai besoin de toi
enfantons des cauchemars pour les hommes
douleurs et ripailles des ruines à leur courage
voici je mange ta chair pour être en toi
et je marque ton corps tu es à moi
tu es à moi tu es à moi tu es à moi
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