Femme objet
Tant qu'à crever de honte, autant l'exhausser.
C'est la seule fuite possible, je crois.
J'ai honte de partout…
Chaque centimètre carré de mon corps, brûle sous ses coups
J'ai mal dans mes cellules, de ses cris, de son joug.
Dans la balance du monde je ne pèse rien.
Sous le marteau de ses poings, je ne pèse rien.
Dans l'estime d'un autre ou la mienne,je ne pèse rien.
Je n'appartiens plus à l'humanité. Et même la honte s'efface.
Je mange.
Je dors.
Je pisse d'urine, de larmes, de sang.
J'ai peur, la plupart du temps.
J'ai aimé une illusion. Je la vois encore quelquefois, cachée dans son sourire et dans le charme de sa conversation.
Personne ne me croira.
Je dors au pied de son lit ou il me prend parfois comme on se saisit d'une chaise.
Sa sexualité sauvage est sans état d'âme, comme il mange ou comme il boit, il viole, avec la même gourmandise.
Il me frappe avec rage et lucidité mais jamais où cela pourrait se voir.
Il n'explique même plus pourquoi : je l'indiffère tellement.
Je ne suis plus rien que les latrines de ses besoins.
Il part tous les matins, habillé de pied en cape, comme un homme de bien. Costume, cravate, l'ascension sociale, portée en médaille.
Il suscite l'envie de ses paires.
Lesquelles s'étonnent de la loque qu'il traîne derrière.
La porte claque, il est rentré.
Je me détache
Et je visite quelque chose que je méconnais.
Il monte l'escalier.
Je me blottis contre le pied du lit, recroquevillée, je le surveille dans le rideau de mes cheveux, ceux qu'il cramponne avant de me contraindre.
La peur est bien là, mais moins présente que ma curiosité pour cette indifférence et ce mépris qui grandissent en moi.
Je crois qu'un autre vient. Je n'ai jamais rien ressenti de tel.
Il me semble qu'un autre m'habite soudain, je ne suis plus le capitaine de ce corps meurtri.
L'homme à l'étage a trouvé son portable et s'apprête à redescendre l'escalier, sans même un regard. Il sait que je sais où est ma place.
Le double en moi, glousse silencieusement, il s'est glissé derrière lui, comme un chat. Et d'un geste brutal, sans même que je puisse l'anticiper, il pousse la brute dans l'escalier, et me quitte aussitôt.
Je regarde un homme qui fut mon rêve d'autrefois.
En bas dans une posture absurde, il ne bouge pas.
Je ne sais pas quoi faire de moi.
Je sais pas quoi faire sans toi.Tu es mort.
Je n'ai plus l'habitude d'agir sans tes ordres.
Je m'assoie sur les marches et j'attends que le temps qui passe décide à ma place.
Il faudra quelques-temps pour que je me rappelle, ce que c'est qu'être humaine.
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