Texte concours blog4ever : mon meilleur souvenir de rentrée scolaire
Je détestais l'école.
Tous ces mômes hurlants, chahutant autour de moi, contre moi, qui me bousculaient, me menaçaient, voire me frappaient, déclenchaient en moi un profond sentiment d'insécurité.…
Il y avait peut-être des raisons à cela : ma tenue, à la dernière mode d'un siècle oublié, mon étourderie, qui m'amenait parfois à heurter quelqu'un mais surtout, bien souvent, j'étais La Nouvelle….
En récrée, je me calais contre les murs, attendant désespérément le moment de regagner la classe. Je pouvais alors profiter de l'abri, tout relatif, suscité par l'autorité d'un maître ou d'une maîtresse, qui pourtant, n'aurait qu'un froncement de sourcil à m'adresser, pour que je me liquéfie sur mon banc.
Chaque jour, la peur m'agrippait avec une intensité variable , mais tous les jours mon ventre était noué.
Nous venions de déménager, j'avais dix ans.
La rentrée serait là dans deux semaines. J'essayais de ne pas trop y penser.
Je jouais seule dans les cages d'escalier d'un bloc bruyant ; pas trop loin de la porte de mon appartement, au cas où il aurait fallu rentrer rapidement.
Il y a toutes sortes de créatures dans les H.L.M. et certaines sont parfaitement antipathiques.
Dans le logement où je vivais désormais, je cohabitais avec l'une d'entre-elles : violente, irascible, imprévisible.
Lors, si son pas résonnait dans l'escalier, je me précipitais dans ma chambre pour m'enfermer dans un monde où je ne me sentais pas menacée.
On s'habitue à tout n'est-ce pas ? La solitude peut accompagner n'importe quel âge…
Un jour, une fillette s'est approchée de ma cage. Elle avait écouté les histoires que je racontais aux petites fées, aux amies délicates…
Elle vivait dans ce quartier depuis longtemps, mais n'avait pas d'amis. Que sa maman.
Or, elle était morte depuis peu, quelques jours il me semble, quelques semaines peut-être ?
Sa peine, ma peine, son chagrin et mes peurs, nos solitudes se sont côtoyés pendant les quinze jours qui précédèrent la rentrée.
Je n'ai pas parlé à Zora de ma hantise. Nous n'avions pas parlé d'école.
Le jour de la rentrée, j'ai traîné ma misère résignée sous un préau infesté d'enfants. Je regardais le bout de mes chaussures. Les maîtres engageaient l'appel : j'attendais que l'on cite mon nom.
Un souffle dans mon cou attira mon attention. Zora me souriait :
« Moi aussi, je suis en CM2 cette année... »
Le soulagement et la joie ont explosé dans ma poitrine.
La rentrée, cette année là avait un visage doré et des boucles vives.
J'ai adoré mon CM2.
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